MINES ET CARRIÈRES

MINES ET CARRIÈRES
MINES ET CARRIÈRES

L’exploitation des mines est liée de façon étroite à l’histoire des civilisations. Les silex de l’âge de la pierre ont d’abord été ramassés sur le sol, puis extraits de couches de chaux, à partir des affleurements, par des puits et des galeries d’une dizaine de mètres qui furent, il y a quinze mille ans peut-être, les premières carrières souterraines.

L’âge du bronze naît de l’exploitation et du traitement des minerais oxydés de cuivre par les Sumériens, trois mille huit cents ans avant notre ère. Un peu plus tard, les Égyptiens développent dans tout le Moyen-Orient de nombreuses exploitations, souvent souterraines, de pierres précieuses, d’or, d’argent et de cuivre; condamnés de droit commun et prisonniers de guerre y sont soumis aux plus impitoyables des travaux forcés. En revanche, l’étain, allié au cuivre dans le bronze, ne se trouve pas sur place et doit être importé, par des voies mal connues, de lointains pays d’Afrique ou d’Asie.

L’exploitation du cuivre par des galeries atteignant une centaine de mètres de longueur se répand dans tout le monde antique. Les roches dures sont abattues avec l’aide du feu. La roche, chauffée à haute température, tend à se désintégrer par suite du comportement variable de ses composants, sous l’effet de la dilatation différentielle des minéraux qui les constituent; l’arrosage de la roche chauffée provoque des contractions thermiques différentielles qui agissent dans le même sens. Les mineurs de l’Antiquité ont utilisé largement le feu pour l’abattage des roches dans leurs exploitations, mais aussi dans certaines opérations militaires, par exemple lors du passage des Alpes par les troupes d’Hannibal, ainsi qu’en témoignent plusieurs historiens latins.

Les besoins en bois du mineur et du métallurgiste ont contribué pour une part importante à la destruction des forêts, et ainsi à la disparition des communautés qui ont forgé leur prospérité sur les premières exploitations minières; la recherche de nouveaux gisements et de nouvelles forêts multiplie les exploitations, près des côtes d’abord, puis très en profondeur dans les montagnes. C’est ainsi que deux mille cinq cents ans avant notre ère, dans une petite vallée des Alpes autrichiennes, débuta l’exploitation du gisement de sel de Hallstatt, encore en activité de nos jours.

La métallurgie du fer apparaît vers 1400 avant J.-C. dans les montagnes d’Arménie et se répand très largement deux ou trois siècles plus tard. Le mont Laurium, encore exploité aujourd’hui pour le plomb et le zinc, fournit aux Grecs de l’argent, mais aussi du minerai de fer oxydé; des réseaux de galeries systématiques fouillent le gisement jusqu’au niveau hydrostatique, à l’extrémité de puits atteignant jusqu’à 100 m de profondeur; les conducteurs de travaux de l’époque ont déjà une bonne connaissance de l’art des mines, et leur cote est élevée sur le marché des esclaves.

Les Romains introduisent au fond les premiers moyens d’exhaure par des séries de grandes roues à godets tournées à bras d’homme; on leur doit les premières réglementations des conditions de travail: la main-d’œuvre est un peu moins maltraitée par les civilisations grecque et romaine que par celles qui ont précédé et que par beaucoup de celles qui vont suivre, mais elle est toujours à base d’affranchis, d’esclaves ou de condamnés.

Les conditions d’exploitation vont rester très semblables pendant longtemps, avant le développement de la vapeur au XIXe siècle, puis de l’électricité. De cette longue période émergent l’organisation et les traditions des communautés minières du Harz, prospères et respectées. C’est en 745 que s’ouvrent les premières mines dans le Harz; à partir de 1185 les premières chartes codifient les droits et obligations des mineurs et donnent des bases solides au développement de l’industrie minière dans le centre de l’Europe. En 1556 paraît le premier traité d’exploitation des mines, le De re metallica d’Agricola ; le cadre juridique, l’organisation du travail, les règles de sécurité, la technologie de l’abattage, du soutènement, du transport du minerai, de l’exhaure et de l’extraction – avec les premiers treuils à entraînement hydraulique – tels que les décrit Agricola resteront des modèles pendant plus de deux siècles.

Les outils d’abattage à main, dérivés de ceux des premiers âges, ne feront plus guère de progrès par la suite; l’emploi du feu pour disloquer les roches dures est strictement réglementé dans les exploitations souterraines du Harz à cause de la toxicité des fumées et des gaz résultant de l’arrosage de la roche; dans d’autres mines, et malgré ces dangers évidents, l’abattage à chaud est couramment pratiqué.

La poudre noire est connue depuis le XIVe siècle au moins, mais, à cause de la pénurie de salpêtre, elle se voit réservée aux opérations militaires; ce n’est qu’au XVIIe siècle qu’on note les premières utilisations de la poudre dans les mines, avec de patients et dangereux efforts pour améliorer la sécurité et l’efficacité du tir. La nitroglycérine est ensuite utilisée pendant quelques années vers 1860, mais, trop dangereuse pour se répandre, elle sera stabilisée sous forme de dynamite par Alfred Nobel en 1867.

Les engrais ammoniaqués avaient fait la preuve de leurs terribles possibilités dans des explosions accidentelles qui avaient presque détruit la ville d’Oppau, en Allemagne, en 1923, et Texas City, aux États-Unis, en 1947; les explosifs nitratés étaient utilisés largement pour les charbonnages dans des formules de sécurité contre le grisou; brevetés en 1955, les explosifs nitrate-fuel, constitués au moment de leur emploi par le mélange de fuel et de nitrate, ont pris peu à peu la première place dans l’abattage des minerais à ciel ouvert.

Enfin, dans les exploitations qui exigent la fracturation de grands volumes de roches, le dernier en date des explosifs, le plus puissant, l’explosif nucléaire, aurait pu trouver une application pacifique; son utilisation est cependant demeurée rarissime.

En France, la loi minière de 1810 définit le cadre juridique des exploitations, repris, après modifications, dans le Code minier de 1956, dont la dernière mise à jour date de juin 1989. On y distingue en particulier les mines, les minières et les carrières. Sont considérées comme mines les exploitations des substances minérales les plus importantes, qui doivent bénéficier d’un acte de concesssion ou d’un permis d’exploitation. Les minières sont constituées des tourbières et de certains gîtes superficiels de minerai de fer, exploitables par le propriétaire du sol, ou par des tiers à qui ce droit est donné par la puissance publique, moyennant indemnisation du propriétaire. Enfin, l’exploitation des substances minérales qui ne figurent pas dans la liste des mines et minières, essentiellement les matériaux qui servent à la construction, directement ou après transformation, à l’empierrement des routes ou à l’industrie céramique, est du ressort des carrières; le droit d’exploiter ces produits appartient en principe au propriétaire du sol.

Les carrières, au sens juridique du terme, sont souvent à ciel ouvert, mais peuvent être souterraines. Pour dresser le tableau des méthodes d’exploitation, ce n’est donc pas le cadre juridique qu’il convient de retenir, mais la distinction beaucoup plus importante entre exploitations à ciel ouvert et exploitations souterraines. Dans ces deux chapitres se rencontrent d’ailleurs des gammes de méthodes extrêmement variées en fonction de la diversité des gisements.

1. Exploitations à ciel ouvert

Près de la moitié du tonnage des minerais métalliques dans le monde, 85 p. 100 des minerais non métalliques, la quasi-totalité des produits de carrière et le tiers du charbon proviennent d’exploitations de surface, dans lesquelles sont déplacées chaque année près de 20 milliards de tonnes de matériaux, minerais, rejets ou produits de carrière.

Certains types de gisements ont conduit au développement de méthodes et de machines originales, notamment les couches de charbon bitumineux américain, les gisements de lignite allemands et les placers d’or et de minéraux lourds.

Mais la plupart des exploitations à ciel ouvert progressent par gradins successifs, à flanc de colline ou dans une fosse qui va en s’approfondissant. En général, le gisement utile n’est pas directement accessible et il faut pour l’atteindre enlever un certain volume de matériaux stériles, terres superficielles ou roches encaissantes: c’est la découverte du gisement. Dans certains cas, plusieurs millions ou plusieurs dizaines de millions de tonnes de matériaux doivent être évacuées avant qu’il soit possible de dégager le premier chargement de minerai.

Une exploitation à ciel ouvert (fig. 1) apparaît donc très souvent comme une gigantesque cuvette, dont les bords sont découpés en gradins, certains dans le minerai, d’autres dans le stérile. La largeur et la hauteur des gradins sont adaptées à la capacité des machines de chargement, de 10 à 20 m avec l’équipement moderne. La pente du talus qui limite un gradin dépend de la tenue des terrains, 60 à 800 par exemple. La pente générale des flancs de la cuvette qui en résulte est normalement inférieure à 450; c’est un facteur très important de la géométrie de l’exploitation.

Il faut avoir du gisement une connaissance assez précise pour définir, en fonction de la profondeur et de la pente moyenne de la fosse, les volumes de matériaux stériles et de minerais à différentes teneurs qui seront disponibles. Un bilan économique à chaque profondeur permet de déterminer jusqu’où doit se poursuivre l’exploitation à ciel ouvert avant de céder la place à l’exploitation souterraine. Dans la carrière de Bingham, aux États-Unis, il y a une différence de niveau de 700 m entre les gradins extrêmes de la découverte.

Dans le cas d’une minéralisation homogène, le facteur économique important est le rapport du tonnage de matériaux stériles au tonnage de minerai; ce rapport peut augmenter avec la valeur marchande du minerai, sans pouvoir dépasser la limite qui conduirait à un prix de revient plus élevé en découverte qu’en souterrain. Dans les exploitations américaines, il est, en moyenne, d’environ 20 pour les charbons bitumineux, 2 pour les minerais de cuivre et les phosphates, inférieur à 1 dans les mines de fer, mais il peut varier considérablement d’une mine à une autre.

Lorsque la teneur est variable, il faut, en outre, définir la teneur limite en deçà de laquelle la roche doit être considérée comme stérile, parce que la récupération du métal ne couvrirait plus les frais de traitement. Les calculs prévisionnels sont donc très difficiles, tout comme ceux qui doivent corriger les projets initiaux en fonction d’une meilleure connaissance des qualités physiques de la roche et de la dispersion des teneurs. Des méthodes de simulation servies par l’ordinateur peuvent donc seules permettre d’approcher la solution optimale. Des considérations analogues restent évidemment valables quels que soient le type de gisement et la forme de la découverte.

Abattage

Dans la plupart des cas, le recours à l’explosif est nécessaire pour abattre les roches (tir primaire) et pour débiter les blocs (tir secondaire).

Le tir d’abattage utilise des trous de mines sensiblement parallèles au front des gradins, presque toujours verticaux. L’explosif travaille ainsi à proximité d’une surface de dégagement contre laquelle l’onde explosive se réfléchit, soumettant la roche à des contraintes de traction à laquelle elle résiste mal; la charge est plus concentrée au pied des gradins, sous-cavant ainsi la partie supérieure qui s’effondre en partie sous son propre poids.

Les trous de mines dont la profondeur est un peu supérieure à la hauteur des gradins ont le plus couramment 10 à 20 cm de diamètre, parfois jusqu’à 38 cm dans les découvertes de charbon. Ils sont le plus souvent percés par des sondeuses rotatives sur châssis automoteur, mais on utilise aussi des sondeuses percutantes, notamment avec un gros marteau pneumatique descendu au fond du trou. Plus récemment est apparue la foration à la flamme, ou jet piercing , qui évoque le chalumeau, l’échappement d’une fusée et l’utilisation du feu pour disloquer les roches, que connaissaient bien les premiers mineurs.

Le tir secondaire pour débiter les blocs peut être coûteux en explosif et en maind’œuvre. On le réduit si l’on peut charger des blocs plus gros, ce qui conduit à augmenter les dimensions des godets des pelles, et des concasseurs placés en tête des ateliers de préparation des minerais.

Chargement

Dans les découvertes en gradins, la machine de chargement la plus importante est la pelle mécanique , analogue à celle que l’on trouve dans les chantiers de travaux publics: un châssis automoteur sur chenilles porte la cabine qui peut tourner, par rapport au châssis, autour d’un axe vertical; de la cabine se détache une flèche inclinée dont l’extrémité porte des poulies de renvoi de câbles; ces câbles permettent la manœuvre d’un bras porte-godet articulé au milieu de la flèche; tiré par les câbles, poussé par le bras contre le massif, le godet se remplit, puis, après rotation de la cabine, se vide dans l’engin de transport par le déclenchement d’un fond ouvrant.

Les pelles puissantes sont toutes électriques. La capacité du godet atteint couramment 4 à 8 m3 dans les grandes découvertes, parfois 12 m3. Les pelles travaillent normalement en butte, devant le talus de déblais à charger. Pour travailler en fouille, c’est-à-dire à l’enlèvement des terres à une cote inférieure à celle du plan qui supporte la machine, on utilise de préférence les draglines . L’engin de chargement est un godet à parois fixes, manipulé uniquement par des câbles: les câbles de suspension et de rappel passent par-dessus les poulies à l’extrémité de la flèche; le godet est vidé par la détente des câbles de traction, qui provoque son basculement. À puissance égale, la dragline a une flèche plus longue et un godet plus petit que la pelle.

Dans les terres faciles à charger, on utilise fréquemment le scraper , qui est un camion autochargeur. Dans la phase de chargement, le fond articulé de la caisse vient racler le sol; le déplacement du scraper, en général aidé par un bulldozer, en assure le remplissage.

Transport

Le scraper sur pneus se déplace rapidement avec sa charge, à une vitesse de 30 à 60 km/h, et économiquement dans un rayon d’environ 1,5 km. Il dépose son contenu en couche étalée, par l’ouverture de son fond articulé et par la manœuvre d’un pousseur qui vide sa caisse. Le scraper est très utile, en particulier pour amorcer la découverte et pour tracer les pistes d’accès aux gradins.

Les découvertes utilisent en outre des moyens de transport plus puissants: voie ferrée, convoyeurs à courroie, camions. La voie ferrée peut transporter à grande distance des matériaux grossiers; mais elle manque de souplesse, exige de gros investissements et ne tolère guère de pentes supérieures à 3 p. 100. Les installations de convoyeurs à courroie peuvent transporter de gros débits à grande distance, en acceptant des pentes de 40 p. 100; mais elles ne peuvent tolérer des matériaux trop grossiers ou trop abrasifs qui entraîneraient une usure excessive des courroies. Les camions spéciaux pour découverte sont adaptés aux conditions de travail très dures qui leur sont imposées sur des pistes rudimentaires à fortes pentes, souvent sous des climats ou à des altitudes très défavorables; les plus répandus sont à vidage par inclinaison de la caisse vers l’arrière; certains, du type semi-remorque, se vident par le côté ou par le fond.

Les premières grandes découvertes, dans lesquelles on manipulait jusqu’à 300 000 t de matériaux par jour, étaient équipées de voies ferrées, avec de grosses locomotives électriques ou diesels-électriques. Mais depuis les années cinquante, les camions l’ont emporté définitivement: leur capacité atteint 90 t de charge utile avec des moteurs diesels-électriques de 700 ch. Dans les découvertes de bitumineux américains, des semi-remorques transportent 110 t de charbon, voire plus de 200 t aux États-Unis.

Pelles et draglines géantes

Les gisements de charbon bitumineux américains sont en général constitués par des couches horizontales. L’exploitation en découverte progresse par tranchées parallèles: dans la tranchée en activité, le charbon est abattu à l’arrière, tandis qu’à l’avant des pelles ou draglines géantes enlèvent les roches de recouvrement et les déposent directement à l’emplacement de la tranchée précédente.

La puissance de ces machines s’apprécie par la capacité de leur godet et par la distance à laquelle elles déversent les déblais. Les grosses draglines ont des godets de 55 et 65 m3 et des flèches atteignant respectivement 83 et 75 m, mais certaines possèdent un godet de 160 m3 et une flèche de 95 m. La plus grosse pelle, adaptée à un recouvrement de 30 m, porte un godet de 135 m3, qui déverse son chargement à 60 m; sa masse totale dépasse 12 000 t. Cette pelle peut enlever de 3,4 millions de mètres cubes de roches par mois.

Les méthodes et les matériels développés dans les bitumineux américains ont d’autres applications, à une échelle plus modeste, dans des gisements analogues (potasse, phosphate, notamment).

Excavateurs géants à godets

Les gisements de lignite allemands comportent des couches très puissantes, très irrégulières, mais à profondeur modérée, dans des terrains dont la tenue serait peu favorable à l’exploitation souterraine. Ils sont exploités en découverte depuis la Première Guerre mondiale. L’outil d’abattage est une roue à godets, parfois une chaîne de godets. Les matériaux abattus sont déversés sur des convoyeurs en série; le lignite est chargé en trains ou envoyé directement dans le parc d’une centrale; le stérile est déversé par une épandeuse à convoyeur en dehors de la zone qui reste à exploiter. L’ensemble de l’installation permet donc un travail continu, et non plus cyclique comme c’est le cas des installations à pelles.

Comme dans les bitumineux américains, l’échelle du matériel n’a cessé de grandir, pour arriver à traiter des découvertes de 250 m de profondeur par gradins de 50 m de haut. La plus grosse machine en service en Allemagne, mobile sur trois trains de quatre chenilles, est équipée d’une roue de 16 m de diamètre, portant dix godets de 4 m3; sa masse est de 7 350 t et la puissance installée dépasse 9 000 kW; la machine débite plus de 10 000 m3/h. Pour servir ces énormes machines, on a construit des wagons de près de 100 m3 de capacité, ainsi que des convoyeurs équipés d’une courroie de 2,60 m de large, qui se déplace à 5 m/s.

Des machines du même type ont été utilisées, à plus petite échelle, dans d’autres gisements.

Exploitations de placers

Les placers sont des gisements alluvionnaires des cours d’eau d’âge tertiaire ou quaternaire dans lesquels peuvent se trouver des concentrations intéressantes de minéraux lourds et peu altérables, tels que l’or, le platine, la cassitérite (SnO2), les pierres précieuses, le diamant.

Certains sont exploités par des moyens artisanaux; d’autres par draglines ou scrapers; beaucoup par abattage hydraulique: le matériau est désagrégé par des jets d’eau puissants – 10 à 50 m3/mn sous une charge de 45 à 135 m – et transporté par l’eau jusqu’aux couloirs de concentration.

Les exploitations les plus spectaculaires utilisent des dragues flottantes, analogues à celles qui travaillent à draguer les ports et les cours d’eau, mais dont certaines ont atteint des dimensions impressionnantes.

Une drague à chaîne de godets flotte sur un étang artificiel, attaque et détruit la berge qui se trouve devant elle, lave les graviers qu’elle ramasse dans des couloirs et tables de concentration et rejette les graviers sans valeur derrière elle; l’étang qui la porte se déplace donc, tandis que la drague avance. La capacité des godets tend à augmenter avec la profondeur de la fouille; elle se situe normalement entre 160 et 450 dm3 pour des profondeurs de 7,5 m à 25 m; mais il existe des dragues à godets de 1,5 m3, et, dans des conditions favorables, la profondeur de la fouille peut dépasser 45 m.

Une grosse drague ramasse plus de 10 000 m3 de gravier par jour et pèse près de 3 000 t.

Lorsque le gisement est bien reconnu, lorsque le projet d’exploitation est arrêté, la solution optimale ayant été choisie en faisant appel à toutes les techniques modernes de prise de décision, la découverte ne pose plus de problème spécifique à la profession minière; le mineur abandonne alors, en grande partie, l’exploitation au technicien des travaux publics. Le rendement d’un matériel électrique et mécanique coûteux, parfois gigantesque, toujours soumis à de très dures conditions de travail, ne peut être satisfaisant que dans la mesure où sont efficaces les services de contrôle, d’entretien et de réparation.

Les exploitations à ciel ouvert ont dans le monde une importance considérable, car dans les pays neufs les gisements superficiels sont les premiers découverts, les plus économiques et les premiers exploités. Dans les pays à forte population, les gisements accessibles à ciel ouvert s’épuisent, et on doit reculer souvent devant des méthodes qui détruisent impitoyablement la nature; du moins de sévères mesures de restauration s’imposent-elles lorsque des dizaines de millions de mètres cubes de roches ont été déplacés.

2. Exploitations souterraines

Dans le monde, chaque année, plus de 3 milliards de tonnes de minerais sont extraites d’exploitations souterraines, dont 2 milliards de tonnes de charbon brut, 900 millions de tonnes de minerais métalliques et 150 millions de tonnes de minerais non métalliques. Une gamme très diversifiée de méthodes d’exploitation est nécessaire pour s’adapter à l’extrême variété des gisements: filons stratiformes ou couches de toutes épaisseurs (de quelques centimètres à 50 m, et davantage), de toutes inclinaisons (de 0 à 900), ou grandes masses minéralisées; gisements réguliers, inaltérés depuis leur formation, ou bouleversés par des mouvements orogéniques postérieurs, hachés d’irrégularités d’épaisseur et de pendage, découpés par des plis et des failles; tenue du minerai et des roches encaissantes pouvant varier depuis celle des sables boulants jusqu’à celle de granites ou calcaires plus résistants que les meilleurs bétons; profondeurs pouvant atteindre 2 000 ou 3 000 m; travaux secs et poussiéreux, ou au contraire sous la menace constante de l’eau, etc.

Mais dans leur ossature générale et dans leurs services généraux, la plupart des mines souterraines ont des problèmes communs et des solutions voisines; et les classifications que l’on peut faire des différentes méthodes d’exploitation apparaîtront plus clairement après quelques considérations de mécanique des roches sur les pressions et mouvements de terrains.

Ossature générale

Une mine comporte au moins deux puits verticaux d’accès au gisement, ou plus généralement deux voies d’accès, puits verticaux ou inclinés, ou galeries à flanc de coteau. Un puits assure normalement la totalité ou une partie des fonctions suivantes: aérage (entrée ou retour d’air), circulation du personnel, extraction des produits, transport du matériel et des fournitures, descente des remblais, exhaure.

Sauf dans certaines mines qui n’exploitent qu’une seule couche à peu près horizontale, les travaux miniers se développent dans les trois dimensions de l’espace.

Suivant la verticale, le volume est partagé en tranches de 25 à 150 m de hauteur, ou étages , exploitées successivement en descendant. Le plan de base de chaque étage, qui constitue aussi la tête de l’étage aval, est matérialisé par un réseau de galeries principales, à faible pente descendante vers les puits – pour l’évacuation des eaux –, qui réunissent les puits aux différentes zones d’exploitation ou quartiers ; la recette est une gare d’échange entre le réseau des voies d’étage et un puits.

À l’intérieur d’un étage sont tracées des voies de communication entre les galeries de tête et les galeries de base, qu’il s’agisse de voies verticales (faux puits ou bures) ou de voies inclinées (plans inclinés et cheminées).

On pénètre dans la mine par une galerie horizontale à flanc de coteau et par un puits dont les trois recettes définissent les niveaux 1, 2 et 3 (cf. ossature générale d’une mine, fig. 2). Entre les niveaux 1 et 2, un bure et deux cheminées font communiquer les voies de tête et de base de l’étage; mais il n’y a plus de chantiers d’exploitation. Entre les niveaux 2 et 3 sont en activité deux chantiers: A (chambre vide en gradins droits) et B (chantier remblayé). Un plan incliné relie le niveau 3 au niveau 4, qui est en aval-pendage de la recette principale du puits; entre les niveaux 3 et 4 sont en activité trois chantiers: C (chantier magasin), D (traçage et soutirage) et E (chantier remblayé).

Certaines voies d’ossature générale peuvent parfois être creusées dans le minerai; la plupart sont dans les roches encaissantes: des recoupes ou des voies en veine donnent accès aux chantiers de dépilage dans lesquels le minerai est abattu. On aura une idée de l’importance de l’ossature d’une mine en notant, par exemple, que les charbonnages français entretenaient plus de 3 500 km de galeries pour une production annuelle de 50 millions de tonnes.

Une partie de la production de la mine provient du creusement des voies qui permettent de pénétrer dans le gisement, ou de préparer les chantiers en les raccordant aux voies d’ossature générale, afin de les aérer, d’y accéder, de transporter le matériel et les fournitures nécessaires à l’exploitation et d’évacuer la production: c’est le minerai abattu dans les traçages; mais la plus grande partie provient des chantiers de plus grandes dimensions, adaptés à la forme et à la tenue du gisement: ce sont les chantiers de dépilage dont on montrera plus loin l’extrême variété.

Services généraux

On désigne sous le nom de services généraux l’ensemble des services fonctionnels qui assurent la préparation et la desserte des chantiers ou qui sont utiles à l’ensemble de la mine.

Travaux préparatoires et transports

Le service des travaux préparatoires est chargé de tracer l’ossature générale et de monter les chantiers de dépilage, c’est-à-dire d’exécuter tous les travaux préalables à la phase de dépilage normal.

Le minerai est presque toujours transporté jusqu’au puits dans des trains de berlines , traînés par des locomotives Diesel ou électriques – à trolley ou à accumulateurs; les grands roulages font appel à toutes les techniques modernes des chemins de fer de surface, à l’échelle d’une voie de 60 cm ou de 1 m. Si le minerai est peu abrasif, dans les houillères notamment, les transports au quartier sont assurés par convoyeurs à courroie, qui parfois vont jusqu’au puits, et même jusqu’au jour par une galerie inclinée. Les transports auxiliaires – personnel, fournitures, remblai – utilisent la voie ferrée ou des monorails suspendus, ou encore des camions électriques; dans les mines largement ouvertes peuvent circuler des camions Diesel, moyennant certaines précautions pour éliminer le danger des gaz toxiques de l’échappement.

L’extraction

Dans les puits circulent des cages , qui reçoivent les berlines sur un ou plusieurs plateaux, ou des skips , sortes de caisses qui s’emplissent de minerai au fond et se vident au jour; le transport du personnel et des fournitures exige au moins une cage. Dans les puits modernes, les installations d’extraction sont automatiques: lancés à 70 km/h, sur des parcours de quelques centaines de mètres seulement, portant une charge utile de 10 t ou davantage, cages et skips partent et s’arrêtent sans intervention manuelle, au niveau voulu, avec toute la précision nécessaire pour que se déclenchent les manœuvres aux recettes.

L’aérage

L’air s’échauffe dans les travaux du fond, surtout à cause de l’augmentation de la température des terrains avec la profondeur. L’air chaud tend à s’échapper par les voies ascendantes, appelant de l’air froid par le puits le plus profond; ainsi un aérage naturel s’établit-il dans toutes les mines; mais dans les charbonnages où se dégage du grisou, dans les mines profondes trop chaudes, ou lorsque les poussières et les fumées de tir sont trop abondantes, l’aérage naturel est insuffisant et doit être renforcé par un ventilateur, qui en général aspire l’air chaud par le puits le moins profond. Dans certaines mines particulièrement chaudes, on peut même être conduit à refroidir l’air par de puissantes installations de réfrigération.

Dans les mines d’or d’Afrique du Sud qui ont dépassé la profondeur de 3 000 m, la température de la roche en place atteint 45 0C à 2 400 m, et l’atmosphère est humide à cause des mesures prises pour abattre les poussières et protéger les mineurs contre la silicose. Les conditions de travail sont donc très pénibles et c’est pourquoi beaucoup de mines sont équipées de puissantes installations de réfrigération, de plusieurs milliards de joules par heure, qui refroidissent à quelques degrés Celsius les 200 à 250 m3/s d’air aspiré par le puits d’entrée d’air. Dans les travaux du fond, des installations plus légères contribuent à assainir les chantiers. Des mines, plus chaudes parfois, mais sèches, posent à cet égard moins de problèmes, telles les mines d’or de Kol r, en Inde du Sud, où la température de la roche en place atteint 57 0C à 2 400 m de profondeur.

L’exhaure

Certaines mines sont sèches; dans d’autres, on doit remonter de grosses quantités d’eau – par exemple, 4 à 10 m3 d’eau par tonne de minerai en moyenne dans les anciennes mines de fer lorraines –, ce qui nécessite d’importantes pompes au fond, largement calculées pour éviter tout risque d’envahissement des salles de pompes par les eaux.

Les services généraux du jour nécessaires pour faire face aux besoins de l’exploitation peuvent être très nombreux: parc à bois, lampisterie, bains-douches magasins, ateliers d’entretien, préparation des minerais, service des bâtiments, formation professionnelle, services sociaux, etc.

Pressions et mouvements de terrains

Les roches résistent en général bien à des efforts de compression, mais très mal à des efforts de traction. Certaines se fissurent et cassent après des déformations peu importantes, et peuvent être qualifiées de fragiles, que leur résistance soit faible comme celle de la craie, ou élevée comme celle des calcaires ou des grès durs. D’autres peuvent fluer et subir des déformations permanentes très importantes sans perdre leur cohésion comme les argiles et les schistes, mais aussi comme beaucoup de roches à grande profondeur: le plissement des couches, la déformation des fossiles, les mouvements de terrains au voisinage des travaux miniers sont d’évidents témoignages de la plasticité des roches.

Les hypothèses simplifiées de l’élasticité – déformation proportionnelle à l’effort et réversible – sont suffisantes pour l’étude de la plupart des structures construites par l’homme, parce qu’elles sont faites pour durer et que les matériaux qui les constituent travaillent en principe loin de leurs limites de rupture. Au service du mineur, la mécanique des roches a besoin de modèles plus élaborés, prenant en compte, par exemple, des phénomènes d’élasticité non linéaire, de relaxation ou de fluage, et l’influence du temps; le développement de l’analyse numérique, et son traitement informatique a permis un grand développement des recherches dans ce domaine; des études sur maquettes ou modèles réduits sont parfois utiles.

Mais l’expérience avait déjà accumulé au cours des siècles des connaissances solides sur les pressions et mouvements de terrains.

Avant l’ouverture d’un vide, la roche en place en profondeur est soumise à une forte compression avec étreinte, c’est-à-dire que la contrainte en un point comporte toujours une importante composante de compression, quelle que soit l’orientation de l’élément de plan à laquelle elle se rapporte. Sur un plan horizontal, la compression résulte de la masse des terrains susjacents; proportionnelle à la profondeur, elle est de l’ordre de 2 500 t/m2 à 1 000 m.

L’ouverture d’une galerie provoque l’annulation des contraintes radiales sur le pourtour du vide tandis que les bancs en couronne s’appuient sur les parements, c’est-à-dire sur les terrains laissés en place de part et d’autre de la galerie; des efforts de cisaillement et de traction peuvent apparaître, et trois comportements types peuvent se manifester suivant les caractéristiques de la roche et les contraintes qu’elle subit:

– la roche reste dans un état d’équilibre pseudo-élastique, et une certaine détente vers le vide n’en affecte pas la cohésion: la galerie tient sans revêtement, ni soutènement ;

– ou elle se fissure et casse – comportement fragile – et les blocs détachés en couronne doivent être maintenus en place par un soutènement porteur; au-delà de la zone disloquée, les terrains sont en équilibre;

– ou enfin elle tend à fluer vers le vide, et il faut un soutènement résistant pour s’opposer à cet écoulement plastique qui peut mettre en mouvement un grand volume de terrains autour de la galerie.

Le temps joue en outre un rôle important dans le phénomène: une galerie peut tenir indéfiniment sans soutènement, ou se détériorer assez lentement pour qu’une purge soignée de la couronne suffise à éliminer les blocs susceptibles de se détacher, ou encore exiger qu’un soutènement soit mis en place aussitôt après le creusement; la poussée plastique vers le vide peut se manifester progressivement pendant des mois et des années, détruisant parfois plusieurs soutènements successifs, avant qu’un état d’équilibre soit atteint ou que la galerie, devenue inutile, soit abandonnée.

Des considérations analogues expliquent ce qui se passe au voisinage des chantiers de dépilage, qui se développent en général dans deux et parfois trois dimensions. Mais, dans ces chantiers, il faut distinguer les allées de travail et les vieux travaux . Dans les allées de travail, ou les voies de circulation, ou plus généralement les zones où circule et travaille le personnel, la sécurité doit être assurée par la conception de la méthode de dépilage, la purge des fronts ou le soutènement, chaque fois que c’est nécessaire. Dans les vieux travaux, on ne circule plus, mais il faut prévoir leur comportement afin d’éviter toute réaction dangereuse pour les chantiers voisins ou pour la surface. Ils peuvent être laissés vides, remblayés ou foudroyés:

– laissés vides: dans les zones dépilées, des piliers de minerai, ou des piliers abandonnés dans les zones les moins riches, supportent le poids des terrains de recouvrement; un dimensionnement suffisant des piliers assure la stabilité de l’édifice;

– remblayés, c’est-à-dire bouchés par des apports de matériaux stériles transportés depuis le jour: rejets d’ateliers de concentration du minerai ou produits de carrière;

– foudroyés, c’est-à-dire bouchés par l’éboulement contrôlé dans le vide des terrains en couronne du chantier.

Les terres foisonnées qui prennent la place du minerai, par remblayage ou foudroyage, se tassent progressivement, et les terrains de recouvrement s’affaissent; en quelques mois, l’affaissement gagne le jour; le volume de la cuvette d’affaissement en surface est très voisin, à 10 p. 100 près, de celui du vide ouvert au fond par l’enlèvement du minerai, et il n’est réduit que de 50 p. 100 par le remblayage le plus dense. Si les travaux miniers sont peu profonds, ils peuvent provoquer en surface des éboulements brutaux, avec fissurations et crevasses, beaucoup plus dangereux pour les constructions, les routes ou les cours d’eau qu’un affaissement progressif et contrôlé.

Le soutènement, lorsqu’il existe dans les chantiers et galeries des mines métalliques, est essentiellement constitué par des poteaux de bois, qui peuvent porter, plaquées contre la couronne, des poutres de bois que l’on désigne parfois sous le nom de chapeaux, rallonges et souvent sous des appellations locales très variées; si besoin est, au-dessus des rallonges, un garnissage de planches ou de bois plus petits empêche l’effritement des terrains. Dans la plupart des charbonnages, en revanche, le soutènement est constitué par des éléments métalliques, conçus pour être facilement mis en place et récupérés, adaptés aux chantiers – étançons télescopiques et rallonges – ou aux galeries – cadres et cintres coulissants ou rigides. La forme la plus moderne du soutènement dans les longues tailles des houillères fait un large appel à l’hydraulique: étançons individuels ou piles à plusieurs étançons sous un chapeau métallique; un étançon hydraulique est un vérin capable de porter 20 à 40 t et de coulisser, par le jeu d’une soupape de sécurité, sous une charge plus élevée.

En outre, un type de soutènement tout différent, le boulonnage, s’est notablement développé depuis une vingtaine d’années; les boulons sont des tiges d’acier d’environ 25 mm de diamètre, de 1 m à 2,5 m de long, introduites dans des trous analogues à des trous de mines et ancrées dans la roche de façon à résister à un effort d’arrachement important, d’une dizaine de tonnes par exemple (fig. 3); à leur extrémité libre, ils sont mis en tension par le serrage d’un écrou qui serre contre la roche une plaque d’appui ou une rallonge, ou encore un grillage de protection.

Le boulonnage a pour effet de renforcer la cohésion des terrains autour du vide, en constituant une poutre épaisse qui tient, alors que les strates qui la composent, si elles se détachaient les unes des autres, s’effondreraient successivement; dans certains cas – soutènement suspendu – il accroche à la roche saine, en profondeur, une zone superficielle de mauvaise tenue. On peut dire aussi qu’il travaille comme les armatures d’un béton armé en corrigeant la mauvaise résistance à la traction de la roche.

Méthodes d’exploitation

La méthode d’exploitation définit le découpage du gisement en chantiers élémentaires, l’ordre dans lequel ces chantiers sont dépilés et les méthodes de dépilage mises en œuvre; un gisement de grandes dimensions est normalement découpé en chambres, exploitées dans une première phase, et en piliers, abandonnés ou repris ultérieurement par une autre méthode; des méthodes de dépilage différentes peuvent donc trouver place dans un même gisement, suivant la phase considérée, et aussi pour s’adapter aux conditions locales. Ces différentes méthodes peuvent être classées, selon le traitement des vieux travaux, en quatre groupes.

Les exploitations en chambre vide («open stope»)

Dans les exploitations en chambres vides, les vieux travaux sont laissés vides, sans remplissage, avec ou sans soutènement. Deux types de méthodes sont particulièrement importants dans ce groupe:

– Les exploitations par piliers abandonnés , dans des gisements horizontaux ou de pendage modéré, inférieur à 30 ou 45o. Les piliers abandonnés jouent un double rôle: soutènement et contrôle du toit. Ils doivent tout d’abord protéger pendant la phase de dépilage contre l’éboulement du toit immédiat, c’est-à-dire des terrains qui se trouvent immédiatement au-dessus du chantier. Dans ces méthodes, en effet, le soutènement est très rarement systématique; dans des chambres de grande ouverture – certaines, par gradins successsifs, ouvrent des vides de plusieurs dizaines de mètres de hauteur –, tout étayage est impossible, seul le boulonnage, qui accroche la couronne du chantier à des bancs plus élevés, peut être mis en œuvre. Les piliers abandonnés jouent également un rôle dans le contrôle du toit, visant à interdire après le dépilage des éboulements massifs dans les vieux travaux, susceptibles d’être dangereux pour la surface ou les chantiers voisins.

– Les exploitations par traçage et soutirage (fig. 4). Ces exploitations se développent considérablement: la chambre est un parallélépipède dont la section horizontale est à peu près un rectangle et dont la troisième arête est verticale ou à forte pente; des galeries horizontales permettent de forer dans la masse des trous de mines en éventail dans des plans parallèles; les mines situées dans un même plan sont tirées simultanément, abattant environ un millier de tonnes de minerai. Le minerai tombe au fond de la chambre, où il est soutiré par des entonnoirs creusés dans la roche, en tête de cheminées descendantes qui aboutissent dans des galeries de ramassage et de transport. L’avantage évident de ces méthodes est que le personnel ne travaille jamais que dans des traçages de faible section.

Les exploitations en chambres magasins («shrinkage»)

Une chambre magasin est une chambre analogue à celle de la méthode précédente, à pente au moins égale à 450, où le minerai est abattu par tranches horizontales montantes.

Sur la figure 5, les chambres 2 et 3 sont en cours de dépilage. Dans la chambre 3, une tranche horizontale est achevée et un marteau fore en couronne les mines qui permettront d’amorcer la tranche suivante. Dans la chambre 2, une tranche horizontale est en cours d’abattage; dans chaque aile, un marteau fore les mines horizontales de la prochaine volée. Le dépilage de la chambre 3 est achevé sous un pilier de minerai, ou stot de protection, qui permet de conserver intacte la galerie de tête; cette chambre est vidée et pourra ultérieurement être remblayée à partir de la galerie de tête. À la base des chambres, le minerai est découpé en V, au-dessus de trémies qui permettent de le charger en berlines, pour vider la chambre 1, ou à la base des chambres 2 et 3, pour évacuer après chaque tir l’excédent de volume dû au foisonnement. La coupe AA montre les gaines de circulation maintenues ouvertes au contact du minerai abattu et permettant d’accéder au chantier par des échelles.

Les exploitations remblayées («cut and fill»)

Dans les mines métalliques, la forme la plus commune des exploitations remblayées est analogue à celle d’un chantier magasin, mais le minerai est évacué en totalité dès qu’il est abattu, et le vide comblé par du remblai mis en place par gravité.

Dans des couches à faible pente, notamment dans la longue taille des charbonnages, un transport pneumatique ou hydraulique du remblai est souvent utilisé pour sa mise en place.

En général imposé par la mauvaise tenue des épontes, c’est-à-dire des terrains qui entourent le minerai, le remblai est souvent mis en place dans un chantier boisé, soit par un étayage simple, soit par une charpente continue lorsqu’on a affaire à une large ouverture ou à des conditions difficiles.

La figure 6 schématise une exploitation remblayée caractérisée par l’inclinaison du front; le minerai abattu à l’explosif descend par gravité sur le talus de remblais et s’évacue par le compartiment d’extraction de la gaine de circulation, qu’un boisage jointif maintient ouverte au contact des remblais; le minerai tombe en chute libre dans la galerie de base où il est chargé en berlines par une pelle mécanique; les remblais sont mis en place par gravité à partir de la voie de tête.

Les exploitations par foudroyage

Dans des exploitations en tranche unique , la sécurité des allées de travail est assurée par un soutènement ou des piliers de minerai provisoires; l’enlèvement du soutènement ou le torpillage des piliers, c’est-à-dire leur destruction à l’explosif, provoque l’effondrement de la couronne stérile.

Lorsqu’un gisement de grandes dimensions est découpé en tranches horizontales prises en descendant (top slicing ), le dépilage est analogue à celui d’une tranche unique. Des cheminées verticales creusées dans le minerai font communiquer la galerie principale de roulage avec les galeries horizontales, ou niveaux, qui définissent les tranches successives. Sur la figure 7, deux tranches sont visibles, la tranche supérieure n en avance sur la tranche inférieure n + 1. Dans chaque tranche, le dépilage progresse par recoupes successives, protégées par un boisage serré et robuste. Une recoupe achevée est foudroyée, ce qui signifie que l’enlèvement ou la destruction du soutènement remet en mouvement les terrains en couronne, eux-mêmes constitués par des éboulis en provenance des tranches supérieures.

Dans le foudroyage par sous-niveaux (sub level caving ), les tranches paires sont prises comme une tranche unique, sous une tranche de minerai de quelques mètres d’épaisseur, foudroyée et récupérée dans les éboulis.

Le foudroyage par blocs (bloc caving ) consiste à sous-caver un bloc de minerai de plusieurs dizaines de mètres de hauteur pour provoquer son foudroyage. La figure 8 illustre l’exploitation par foudroyage d’un bloc de minerai d’environ 300 000 t. La base du bloc est découpée en entonnoirs, au-dessus des cheminées de soutirage qui permettent au minerai foudroyé de descendre par gravité dans les niveaux de raclage horizontaux. Le foudroyage est amorcé par le dépilage d’une tranche de minerai à la base du bloc et progresse dans la masse du minerai, puis dans les terrains stériles de recouvrement. Tant que les éboulis qui apparaissent à la sortie des cheminées de soutirage sont constitués par du minerai, ils sont évacués par raclage jusqu’à l’extrémité des niveaux; là, après calibrage à travers des grilles et éventuellement débitage des gros blocs à la masse ou à l’explosif, ils sont envoyés dans les cheminées collectrices à la base desquelles ils sont chargés en berlines dans le niveau de roulage.

Exploitation des mines de charbon

Gisements et méthodes

Les plus beaux gisements de charbon dans le monde, ceux dont l’exploitation se développe encore malgré la concurrence des autres sources d’énergie, sont les plus réguliers, les moins affectés par les mouvements orogéniques; ils sont formés de couches d’épaisseur moyenne – de 1,5 m à 3 m – et de pendage nul ou modéré; ils sont exploités par piliers abandonnés, à faible profondeur, ou par longues tailles.

La longue taille, très rare en mine métallique, est caractéristique des charbonnages; elle est desservie par deux galeries en couche, la voie de tête et la voie de base, distantes de 100 à 300 m. Le chantier lui-même comporte deux ou trois allées de travail (soit une largeur totale de 2 à 4 m) qui réunissent voie de tête et voie de base; ces allées sont maintenues ouvertes par un soutènement, entre les vieux travaux et le front de taille. Elles servent à la circulation du personnel et des machines, à l’alimentation du chantier en énergie et contiennent les engins d’évacuation du charbon, en général des convoyeurs à chaînes, c’est-à-dire des couloirs de tôle dans lesquels le charbon est poussé mécaniquement par des raclettes métalliques mises en mouvement par des chaînes sans fin.

Du côté front, l’abattage enlève à chaque cycle une tranche de charbon correspondant au volume d’une nouvelle allée. Du côté vieux travaux, le soutènement est récupéré pour être reposé à l’avancement, d’où en général foudroyage de la couronne; dans certains cas, les vieux travaux sont remblayés (fig. 8).

Mécanisation des chantiers

L’abaissement du prix de revient est recherché dans l’augmentation de la production unitaire des chantiers, autrefois par la concentration du personnel, aujourd’hui par la mécanisation de l’abattage, du soutènement, du chargement et du transport. Le soutènement était autrefois réalisé en bois, ou encore en éléments d’acier démontables, dont la manutention était coûteuse en main-d’œuvre; le développement des piles hydrauliques, à commande à distance ou automatique, a ouvert la voie à l’automatisation complète des opérations au chantier (cf. principe d’une taille mécanisée, fig. 9).

Le havage est effectué par une machine se déplaçant sur le convoyeur blindé de la taille, le long du front (fig. 9 a). L’organe d’abattage est un tambour armé de pics qui découpe une tranche de charbon d’environ 80 cm d’épaisseur. Des piles hydrauliques constituées par deux vérins portant un large chapeau maintiennent le toit au-dessus des allées de travail, en arrière desquelles les terrains non soutenus sont foudroyés. La haveuse passée, le charbon évacué, la nouvelle allée est nettoyée. Un vérin hydraulique porté par la pile, dit vérin de ripage, a poussé le convoyeur contre le nouveau front (fig. 9 b); un soutènement provisoire est assuré au-dessus du convoyeur par une allonge métallique télescopique portée par le chapeau de la pile. Lorsque le ripage du convoyeur est achevé, la pile est desserrée, tirée par le vérin de ripage à proximité du convoyeur, puis resserrée pour constituer un soutènement sûr dans les nouvelles allées de travail (chaque étançon peut porter 20 à 40 t avant de coulisser sous la charge): c’est le ravancement de la pile (fig. 9 c); en arrière, le toit n’est plus soutenu et s’éboule; la taille est prête pour un nouveau cycle d’abattage.

L’abattage mécanique se développe aussi pour d’autres minerais, la potasse notamment – et même dans des roches assez dures –, en particulier dans le creusement de galeries ou de tunnels; mais avec la dureté de la roche doivent augmenter la puissance de la machine et la poussée sur l’outil; dans le charbon, une machine d’une centaine de kilowatts travaille efficacement.

Les progrès de la mécanisation augmentent la productivité des houillères et ont, en outre, une heureuse influence sur la sécurité.

Dangers propres à la mine de charbon

D’effroyables accidents collectifs, que les progrès de la technique ont rendus plus rares et plus limités, mais sans pouvoir les supprimer, alertent trop souvent l’opinion sur les dangers qui s’appellent grisou, poussières, feux et incendies.

Dans de nombreux gisements de charbon se dégage du grisou, un gaz formé essentiellement de méthane, dont l’inflammation se propage lorsque la teneur est comprise entre 6 et 16 p. 100, avec la brutalité caractéristique et bien connue des coups de grisou; pour éliminer ce danger, l’exploitation des mines grisouteuses est donc soumise à d’impérieuses contraintes: dégazage préalable, dans certaines conditions favorables, par un réseau de canalisations évacuant directement le grisou au jour; aérage largement assuré pour rester très en dessous des teneurs dangereuses; suppression des causes possibles d’inflammation, notamment par l’élimination des feux nus, la protection de l’échappement des moteurs Diesel, la construction spéciale des appareils électriques et l’emploi d’explosifs de sécurité.

Dès que la teneur en matières volatiles dépasse 18 ou 20 p. 100, dans des nuages de poussières de charbon soulevées et enflammées, par exemple, à l’origine, par un coup de grisou, la flamme peut se propager avec des effets mécaniques et thermiques terrifiants, en produisant de l’oxyde de carbone qui porte la mort dans toutes les voies parcourues par les fumées; dans les mines poussiéreuses, des mesures sévères doivent être prises pour abattre les poussières, pour en éliminer les dépôts et, surtout, pour les neutraliser, c’est-à-dire les rendre inaptes à propager l’inflammation. La neutralisation est obtenue, en pratique, par des apports de matériaux stériles, solides et très fins (schistification) ou par des apports liquides (injection d’eau et arrosage).

On appelle incendie dans les mines l’inflammation des matières combustibles introduites au fond pour les besoins de l’exploitation: bois, huiles, fuel notamment. Dans le retour d’air d’un incendie, les fumées sont chaudes et mortelles parce que privées d’oxygène et chargées de gaz toxiques. Si l’incendie détruit le soutènement en bois et provoque des éboulements, si l’échauffement de l’air perturbe l’aérage sur des circuits en parallèle, de nouvelles galeries peuvent être envahies par des gaz toxiques.

Dans les houillères, le charbon lui-même peut brûler; on parle alors d’un feu, qui produit toujours de grandes quantités d’oxyde de carbone.

L’oxyde de carbone, les gaz résultant du contact de l’eau et des matières incandescentes, et éventuellement le grisou, donnent des explosions en présence d’oxygène, dans certaines limites de teneurs. La lutte contre les feux et incendies s’efforce de priver le feu d’oxygène, d’éviter les explosions ou de protéger le personnel contre elles. Cette lutte et la reprise des quartiers provisoirement abandonnés sont donc des tâches particulièrement difficiles au fond, que les équipes de sauveteurs ne peuvent affronter qu’au prix d’un entraînement soutenu et d’un dévouement exemplaire.

Sécurité

Le tragique bilan des grandes catastrophes collectives, depuis les 1 099 victimes du coup de poussières de Courrières, en 1906, jusqu’aux 262 morts de l’incendie du puits de Marcinelle, en 1956, est pour l’opinion publique l’expression même du danger constitué par les travaux souterrains.

En fait, ce danger est à la fois plus étendu et plus limité. Plus limité, parce qu’en définitive, malgré des risques spécifiques considérables et grâce aux efforts déployés à tous les niveaux pour les combattre, le travail au fond n’est pas la plus meurtrière des activités professionnelles: c’est ainsi que, en France, l’heure de trajet, du domicile au puits, faisait plus de morts que l’heure passée dans la mine. Plus étendu, parce que toute opération au fond pose des problèmes de sécurité particuliers, parce que pour 1 mort les statistiques font apparaître 15 à 20 invalidités permanentes et plusieurs centaines de blessures plus légères; parce qu’aux accidents s’ajoute l’action des poussières sur les poumons du personnel (pneumoconioses, silicose).

En France, il est d’usage de rapporter les statistiques d’accidents au nombre de postes effectués, c’est-à-dire au nombre de journées de travail. De 1965 à 1969, on a par exemple enregistré 374 morts au fond dans les charbonnages, soit près de 1 pour 300 000 postes. Sur ce total, 44 p. 100 sont dus aux éboulements et chutes de blocs, 26 p. 100 à des accidents de roulage, 10 p. 100 au grisou et aux poussières, les autres à l’asphyxie par des gaz naturels, aux explosifs, à des chutes de personnel, à des dérives de matériel, à l’utilisation des machines.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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